LA VALEUR
Je laisse ici parler Stephen Jourdain :
« La valeur n’a pas besoin d’être démontrée.
Elle est à elle-même son propre critère. La valeur n’a
pas à être démontrée, et il n’est pire lâcheté
que de vouloir le faire. Il n’est pire lâcheté ni pire
erreur existentielle, spirituelle, que de douter de la révélation
intuitive ; que de la soumettre, frileusement, pour expertise, à la
raison. L’intuition est source pérenne de révélations,
à une condition : qu’on lui fasse confiance, sinon, elle tarit.
Faire confiance à la valeur, c’est lui dire oui ; c’est
l’aimer. Aimer la valeur est la faire naître.
Celui qui a compris cela est aux trois quarts sauvé.
De la nuit si nulle et du jour en feu.
La nuit du non-amour est la nuit de la non-conscience. La nuit de la non-conscience
est la nuit idéologique. La boucle est bouclée.
Je suis, intérieurement, nu comme un ver de terre, et pas plus grand.
Ni plus fort. Ni plus savant.
Je suis sans pouvoir ni savoir, et me garde bien d’en faire une religion.
Je me suis déshabillé de toutes mes idées, j’ai
abattu toutes mes défenses, non par noblesse d’âme, simplement
parce que ce travail devait être fait. Pour quelle raison ? Je ne me
suis jamais posé la question, je n’en ai pas la moindre idée.
Vulnérable. »
La valeur ! Bon nombre de livres de développement personnel prônent
la valeur, l’expliquent, la décortiquent afin de lui donner un
sens et bien des thérapeutes éveillent leurs patients à
reconnaître leur valeur et à la valider. Mais que faisons-nous
réellement lorsque nous agissons de la sorte ? Agissons-nous ou réagissons-nous
? Nous réagissons à notre blessure d’insignifiance en
cherchant coûte que coûte à nous sortir de ce sentiment
d’infériorité qui nous colle à la peau. Nous essayons
de nous sécuriser, en nous disant que nous avons de la valeur, que
nous sommes la valeur même. Nous nous donnons une nouvelle image, certes
plus vivable et réjouissante, cependant toujours et encore demeurant
dans l’identification. Que cherchons-nous à valoriser ? Et en
définitive, qui a besoin d’être valorisé ? D’être
reconnu ?
L’enfant que nous avons été et qui vit au-dedans de nous.
Ses mémoires, ses souffrances. Je ne dis pas non plus qu’il ne
sert à rien de nous valoriser, mais il est important de comprendre
clairement que cette entreprise n’est qu’un pansement recouvrant
notre sentiment de dévalorisation. Bien sûr nous voulons être
mieux psychologiquement, nous voudrions ne plus être déprimés,
ne plus souffrir intérieurement. Et il ne s’agit pas dans mes
propos de comparer les différentes approches, mais bien de comprendre
que lorsque nous agissons de la sorte nous calfeutrons nos idées déprimantes.
« La souffrance est toujours le résultat
d’une lecture distraite de la réalité. »
Jean Bouchart d’Orval
Alors me direz-vous, que convient-il de faire ? Rien ?
Ecouter ce sentiment lorsqu’il fait surface, le ressentir. Et je précise ici : l’écouter sans tomber dedans, sans s’apitoyer, sans se convaincre de quelque chose, et se rendre compte de combien nous tombons dans l’identification, oubliant cette présence à soi. Parce qu’elle est accueil, sans volonté ni intentionnalité, l’écoute guérit l’ensemble corps-psychisme. Ecouter, c’est dire oui à ce qui se présente. Ici, il n’y a pas de place pour quelqu’un qui écoute. L’écoute ne peut s’approprier. C’est justement ce « quelqu’un » qui est écouté, ce quelqu’un avec son histoire, ses injustices et ses revanches.
« La compréhension finale ou
ultime révèle que le chercheur est celui qui est observé.
»
Wayne Liquorman
La valeur n’a pas de nom. Elle se suffit à elle-même.